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Chroniques d'un vieux bougon
24 juin 2011

Vienne et Mahler

      Fritz Wunderlich et Dietrich Fischer-Dieskau donnent la réplique à l’Orchestre Symphonique de Vienne dirigé par Josef  Krips dans "Le Chant de la terre" de Gustav Mahler lorsque le téléphone sonne. Mon ami Jacques, dit le Hibou,  m'appelle depuis Vienne pour m’annoncer que l’accrochage des toiles de Sophie se fera dimanche après-midi et lundi, jours de fermeture du café qui les accueille. Il me rappelle qu'ils m’attendront en compagnie de notre logeur à l’aéroport Wien-Schwechat comme prévu. « N’oublie pas ton billet comme la dernière fois ! » L’aventure, qui remonte à mon voyage au Québec, est devenue une plaisanterie que mes amis ne manquent jamais de rappeler. Je renonce à expliquer les raisons une fois encore et le rassure. « Quel programme avez-vous prévu ? »

         Puisque c’est l’année Mahler, il va de soi que nous visiterons sa maison sur les rives du lac Wörthersee où il composa les fameux "Rückert-lieder", les Chants des enfants morts, ainsi que la salle Gustav Mahler au Staatsoper où est exposé le buste sculpté par Rodin. Après avoir bu un latté accompagné de ses pâtisseries dégoulinantes de crème servies par de charmantes serveuses habillées de noir et ornées d’un tablier blanc au Café Demel, rue Kohlmarkt, nous irons admirer la décoration baroque et délicieusement kitsch  de la Peterskirche, la Michaelerplatz et le Michaelerkuppel avec son dôme et ses statues d’Hercule. Il nous restera encore à  réserver un long détour par le musée du Belvédère où sont accrochées plusieurs toiles de Gustav Klimt dont "Le baiser" et "Judith". « Tu pourras même chercher l’inspiration dans les jardins qui ont, dit-on, des résonances ésotériques ! » Nous devrons par ailleurs consacrer une journée, au moins, au Kunsthistorisches Muséum pour ses collections grecques et romaines. « Et pour la musique ? ». Curieusement, alors que Vienne prétend fêter le centenaire de la mort de Mahler, les concerts s’adressent surtout aux amateurs de Mozart et de Strauss. Nous irons donc, avant toute chose, nous recueillir dans la maison de la rue Domgasse où Mozart composa, dit-on, les "Noces de Figaro". Le Staatsoper donnant régulièrement la musique de l’un et l’autre compositeur, nous n’aurons que l’embarras du choix. « J’espérais également entendre des lieder d’Hugo Wolf… ». Le rire du Hibou me coupe et il me raconte les péripéties qui ont présidé au transport des toiles de Sophie par la SNCF jusqu’à Vienne. « Elles ne sont arrivées qu’avec trois jours de retard à cause d’un détour par Berlin ! Mais aujourd’hui tout va bien ! On dit même que des gens de l’École de Vienne auraient montré de l’intérêt à leur sujet.» Je le questionne sur les cimaises qui accueilleront les vouivres de Sophie mais il m’interrompt. « Pardon de t’abandonner à tes oignons et à tes pommes de terre, dit-il. Mais elle m’attend. Nous allons au Piaristenkeller voir le fameux chapeau de leur François-Joseph et, surtout, déguster leurs merveilleuses pâtisseries dont on dit que… ». Je raccroche avant d’avoir de vrais regrets. Je pourrai, moi aussi, dans quelques jours, m’en goinfrer jusqu’à satiété si l’envie m’en prend. Bien que je n’en soie pas vraiment friand.

        Enroulée sur son coussin, Adèle, ma chatte, agite une oreille agacée lorsque je redonne la parole à Mahler et à ses Chants de la terre. Elle ne se doute pas encore que je vais, une fois de plus, l’abandonner.  (Roland Bosquet)

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