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Chroniques d'un vieux bougon
8 novembre 2014

Alice Fernay, "Le règne du vivant"

Ferney

       Les écologistes sont unanimes : nombre d’espèces animales disparaissent de la surface de la Terre. Il en a toujours été ainsi. Les dinosaures sauraient nous le rappeler s’ils paissaient encore tranquillement dans les vastes plaines d’Europe Centrale ou sur les pentes herbeuses des volcans auvergnats. Mais par l’action dévastatrice du premier prédateur de la nature qu’est l’homme, le désastre s’accélère. Si l’éradication complète des poux et des cancrelats n’est pas pour demain, si tant est qu’elle soit possible en dépit des poudres Marie-Rose et autres insecticides, celle des animaux marins est déjà en bonne voie. Les océans n’abritent plus guère que des espèces en voie de disparition. Dans son roman intitulé "Le règne du vivant", Alice Ferney raconte l’histoire terrible du capitaine Wallace qui tente de lutter contre le pillage systématique des mers transformées en libre-service et en dépotoir. Quand la quantité de bouches à nourrir ne cesse d’augmenter, quand les États se révèlent incapables de faire respecter les lois et quand les traditions les plus aberrantes remontant à la nuit des temps s’allient aux trafics mercantiles les plus éhontés, il ne reste plus d’autres ressources aux ardents défenseurs du milieu naturel que de s’attaquer directement aux pirates eux-mêmes. Et le flamboyant héros d’Alice Ferney de neutraliser les palangriers, d’éperonner les baleiniers, de filmer les scènes de carnages qui illustrent les ponts des navires usines qui sillonnent les zones de pêche. Lui et ses hommes d’équipages savent bien que ces batailles ne peuvent pas se gagner uniquement sur les pontons. Ils les portent avec éclat sur les plateaux de télévision. Ils y transportent également la controverse, bien sûr. Les belles associations écologistes voient en eux de dangereux concurrents. Il ne leur est pas difficile de les décrire comme des extrémistes illuminés qui feraient plus de mal que de bien à la "cause". Alice Ferney pointe là du doigt nos contradictions. Jusqu’à quel point toutes ces organisations plus moralisatrices qu’efficaces ne sont-elles pas complices des forfaits qu’elles dénoncent ? Jusqu’à quel point chaque téléspectateur, pour autant qu’il soit indigné par les images qu’il découvre, ne participe-t-il pas à sa manière au pillage ? Elle ne donne évidemment pas de réponse et laisse le soin à chaque lecteur de faire son propre examen de conscience. Elle montre les combats d’un homme de bonne volonté contre la violence pure. Son livre croise chaque jour l’actualité et nous interroge sur nos inerties. Si la finalité de ces luttes est justifiable, les moyens le sont-ils ? Ne sommes-nous pas lâches de déléguer à d’autres les sacrifices indispensables pour le simple respect de la vie et la survie elle-même d’une humanité à la dérive ? Un roman fort, nécessaire et indispensable. ("Le règne du vivant", Alice Ferney, Actes Sud)

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