Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Chroniques d'un vieux bougon
19 janvier 2016

Paganisme d'aujourd'hui

paganisme

         J’accompagne, il y a quelques semaines, un groupe de promeneurs du club "Les fougères d’or" d’un bourg voisin sur le circuit des mégalithes tracé à travers les Monts par les usages et le temps. Dolmens et pierres levées, blocs de granit libérés de leur gangue de terre et d’humus par l’érosion, sources que la tradition prétend miraculeuses, amas erratique ayant pu servir d’abri à des tribus nomades à l’époque reculée du Magdalénien. Les hêtres et les châtaigniers lancent vers le ciel traversé de lourds nuages gris leurs branches dénudées tandis que nos bottes dessinent de longues traînées luisantes dans l’épais tapis de feuilles mortes. Au détour d’un chemin apparaît, au milieu d’un champ, l’une de ces innombrables roches revêtues de mousses et d’herbes folles qui affleurent un peu partout sur les collines. Au sommet se dresse une croix de pierre rongée par les intempéries. Et chacun de s’extasier devant ce témoignage de ferveur planté là il y a mille ans peut-être par des villageois reconnaissants pour les bienfaits surnaturels de quelque sainte locale. Éradiquer le paganisme fut en effet longtemps l’obsession des dignitaires de l’Église. Sous l’impulsion du pape Grégoire le Grand, au tournant du sixième et septième siècle de notre ère, on renonça à détruire les temples dédiés aux anciennes divinités pour leur substituer des saintes et des saints particulièrement méritants. Et les croisées des chemins de s’illustrer de calvaires, telle source de quitter le domaine des fées et des korrigans pour favoriser les naissances sous le patronage d’une bienheureuse morte en couches, telle autre réputée guérir les flux de ventre être sanctifiée en grandes cérémonies et processions populaires. Tel autel où l’on avait peut-être sacrifié des moutons, des prisonniers sinon même des jeunes vierges pré-pubères se voit consacré aux offices du culte nouveau venu de Rome. Les antiques fêtes païennes qui puisaient leurs racines au cœur même de la nature se transforment en célébrations chrétiennes. Pâques s’arrime à l’équinoxe du printemps initiateur du renouveau, de l’ouverture des bourgeons et de la levée des seigles et des froments. Au solstice d’été, Saint Jean est honoré par des chants et des danses autour d’un grand brasier festif pour consacrer les fiancés en attente du mariage qui les liera pour la vie après les moissons. Et la naissance de Jésus coïncide avec le basculement des jours vers la lumière du solstice d’hiver. Que reste-t-il aujourd’hui du zèle des missionnaires envoyés par Grégoire et ses successeurs ? Le sol de l’Occident chrétien arbore toujours les signes ostentatoires imposés par la religion. Mais qu’en est-il des dogmes ? Un nouveau paganisme nourri d’hédonisme et de consumérisme s’impose désormais. Un paganisme citadin fort éloigné de la nature qu’il oublie, qu’il ignore et qu’il rejette même parfois. Un paganisme gavé de technologie, de communication et de réseaux. Et les luttes font rages entre les adeptes des anciennes croyances et ceux qui veulent jouir sans restrictions de cette civilisation du plaisir et de l’argent. Les chemins de l’Histoire sont hélas jonchés des corps des victimes des dévots de tous bords transformés en forcenés déshumanisés. Et l’Histoire d’aujourd’hui ne montre guère plus de tolérance pour les croyances en général et celles des autres en particulier. La raison et la fraternité sauront-elle un jour dépasser les passions dévastatrices ? Voilà, en tout état de cause,qui nous laisse encore bien des choses à penser à propos de l’avenir.  (Lire "La mystique républicaine" de Charles Péguy éditions de l'Herne et  "C’est par les femmes…" de Marie-France Houdart aux éditions Maiade

(Suivre les chroniques du vieux bougon en s’abonnant à newsletter)

Publicité
Publicité
Commentaires
M
On ne peut qu'être d'accord avec vous, l'Humanité n'est guère raisonnable et notre société n'en finit pas de se poser des questions sur l'avenir reservé à nos enfants. Nous ne sommes pas toujours d'accord les uns avec les autres mais nous pouvons nous rejoindre sur un point. Nous sommes en train de basculer dans un autre monde et il nous appartient de l'inventer. Je ne suis pas non plus très jeune , mais je me refuse à être nostalgique , sachant que de multiples lunes que nous avons adorées pour changer le monde n'ont pas été si glorieuses que ça. Ceci est également vrai pour la génération de nos parents et grands-parents. Je souhaite le meilleur pour nos enfants c'est pour ça que je leur fais confiance, et, tout "branchés" qu'ils sont, je pense sincèrement qu'ils sauront se débrouiller aussi bien que nous.<br /> <br /> Cordialement
Répondre
M
Faudrait-il comprendre que les victimes récentes blasphématoires, paganistes(c.à.d. non chrétiennes) hédonistes et consommatrices, - des mécréants, quoi! - ont bien cherché ce qui leur est arrivé par ceux qui sont restés fidèles à leur foi jusque dans la mort? <br /> <br /> Choc de civilisations ?<br /> <br /> Ceci, n'explique pas pourquoi, dans les quartiers huppés de la même ville, Paris, presqu'au même moment, les puissants, qui ont armé les bras des boureaux, se "vautrent" dans les magasins et hôtels de luxe - qui parfois même leur appartiennent- dans une débauche de consommation , accompagnés de leurs femmes mises sous-tutelles. Faites comme je dis, pas comme je fais.<br /> <br /> On commémore à tout va , mais tire-t-on les leçons de l'Histoire qui montre, encore aujourd'hui, que le monde, globalisé, est gouverné par les puissances de l'argent que l'on se garde bien de combattre. <br /> <br /> Cordialement.
Répondre
L
Beaucoup aujourd'hui prient Saint H&M ou Sainte Zara. Autres temps autres moeurs. Beau billet comme d'hab
Répondre
K
D'origine païenne, n'en rejetons-nous pas cette religion imposée à "coups d'épée" dans le ventre ?...<br /> <br /> L'erreur est de ne pas renouer avec la nature ; cette nature qui faisait de nous des êtres sensibles et humbles...<br /> <br /> J'adore lire vos réflexions profondes sous l'aspect de superficialité...<br /> <br /> Continuez donc à magnifier cette nature de jadis.
Répondre
L
L'humanité est crédule...
Répondre
Chroniques d'un vieux bougon
Publicité
Chroniques d'un vieux bougon
Albums Photos
Newsletter
Derniers commentaires
Archives
Publicité