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Chroniques d'un vieux bougon
11 octobre 2016

L'homme est un prédateur pour l'homme.

oradour

     Mon courtil est chaque jour le théâtre de drames épouvantables. Le moineau gobe la mouche, le merle le vers de terre, la buse capture le mulot, les corbeaux dépècent la tourterelle blessée et le renard le faisan. Les animaux sont de redoutables prédateurs quand il s’agit de se nourrir. Mais lorsqu’ils se battent entre eux pour défendre leur territoire de chasse ou leur harem, leurs luttes vont rarement jusqu’à la mort. L’homme, lui, est probablement le seul animal à tuer ses adversaires et à y prendre plaisir. La littérature s’est même bâtie sur les récits de ses hauts faits.  C’est ainsi qu’Homère achève son Iliade par l’explosion de joie d’Achille devant le carnage qui suivit la prise de Troie. Les cadavres étaient si nombreux qu’ils bouchèrent le cours du fleuve Scamandre au point qu’il sortit de son lit et qu’Achille manqua de périr noyé. À quelques siècles de là, Hannibal ne comptera pas non plus les morts qui jonchèrent par dizaines de milliers les champs de bataille de Trasimène et de Cannes. Plus tard, l’empereur chinois Xuanzong mâtera la révolte d’An Lushan au prix de 33 millions de morts. Gengis Khan bâtira son empire sur le corps de 76 millions de sujets, soit 20% de l’humanité d’alors. Si les batailles d’Iéna et d’Eylau ne firent que quelques dizaines de milliers de victimes russes et françaises en 15 heures de combat, la première guerre mondiale du siècle dernier en aligna 9 millions, Hitler et ses sbires 17, Staline 23 et Mao 78. Par comparaison, les deux bombes atomiques américaines ne feront, mais il est vrai en quelques secondes seulement, que 535 000 morts à Hiroshima et Nagasaki. Et pourtant, depuis qu’Homo Erectus s’est dressé sur ses pattes et malgré tous ces massacres et génocides, malgré les éruptions volcaniques, les tremblements de terre, les tsunamis, les tempêtes et autres épidémies virales et bactériennes, sa population ne cesse chaque jour d’augmenter. Les démographes de la préhistoire estiment qu’environ 5 millions d’individus peuplaient la planète lorsque Caïn l’agriculteur tua Abel le berger nomade. Ils sont aujourd’hui près de 7 milliards 500 millions et les projections les plus sages parlent de 12 milliards pour la fin du siècle.  Pourquoi Dame Nature tolère-t-elle une telle prolifération qui met manifestement en péril l’existence même des autres espèces animales et végétales ? En réalité, en cas de stress, sécheresse excessive ou inondations, attaques extrêmes d’insectes ou de champignons ou même simplement de brusques changements climatiques, les plantes produisent plus de graines et les animaux plus de petits. L’exemple du ragondin dont le nombre croît lorsque l’on tente de l’éliminer en le tuant est explicite. L’objectif de la nature est en effet de préserver toujours la vie et la pérennité de l’espèce. L’homme est évidemment l’un des objets de la Nature et réagit comme tel devant les agressions. Comme les plantes et les animaux, il œuvre à perpétuer son espèce. Plus elle est attaquée ou plus il croit qu’elle est attaquée, plus il produit de petits. Alliée à l’amélioration des conditions de vie, meilleure alimentation et meilleure hygiène, cette réaction naturelle produit donc mécaniquement une augmentation de sa population. Jusqu’où pourrait-elle ainsi progresser ? Certains, sur la base de l’hypothèse Gaïa édictée par James Lovelock, répondront avec un frisson dans le dos que les limites de cette expansion ne seront atteintes que lorsque les pollutions et le pillage des ressources naturelles auront atteint un niveau tel que toute vie sera devenue impossible. À moins que les instances internationales, prenant enfin la mesure de la question, ne décident de procéder comme on le fait désormais pour les ragondins, en émasculant les mâles. Mais comme il paraît bien difficile de faire accepter semblable thérapie jusque dans les moindres recoins de la planète, ne demeure qu’une solution. Supprimer les craintes pesant sur la survie de notre espèce en éradiquant au même titre que les maladies les causes de mort violente telles que les guerres, les massacres, les génocides et autres crimes contre l’humanité. Et peut-être alors verrons-nous la courbe des naissances cesser de s’élever indéfiniment jusqu’au fatal point de rupture. Ce n’est encore à ce jour qu’une fragile hypothèse de vieux bougon de la campagne observateur de la nature qui l’entoure. Mais nul doute que l’aventure mériterait d’être tentée. Elle laisse, en tout état de cause, bien des choses à penser.

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