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Chroniques d'un vieux bougon
8 décembre 2017

De la bêche aux pois chiches.

beche_pois_chiches

       Selon la dame de la météo, les températures du mois de novembre auraient été au-dessus des normales saisonnières. Mais comme le réchauffement climatique ne semble pas sévir également en décembre, j’ai décidé, il y a quelques jours, d’abriter mes poireaux dans une tranchée protégée du gel. En me dirigeant, armé de ma bêche, vers mon jardin potager, je prends conscience que je m’inscris à mon tour dans la longue lignée des hominidés qui, depuis Homo Habilis, ont littéralement transformé la face de notre planète. Nos cousins chimpanzés savent depuis la nuit des temps se servir d’une brindille pour attraper des termites ou d’un caillou pour casser des noix. Homo Habilis, lui, inventa l’art d’aiguiser des pierres pour couper la viande de ses proies et en gratter les peaux pour s’en revêtir. Et le jour où il brandit un os de mammouth pour attaquer une bande rivale, il immortalisa sans le savoir un premier pas de géant pour l’Humanité. En maîtrisant ensuite le feu, il lui devint facile d’éclairer les grottes les plus profondes pour y gribouiller des graffitis et de rôtir un rond de gîte de chevreuil accompagné d’un gratin de courgettes, éloignant ainsi nombre de parasitoses alimentaires. Il lui devint surtout possible de se réunir, le soir, autour d’un brasero pour échanger les potins du jour, critiquer les conseils de l’ancien, énumérer les évidentes qualités de l’accorte fille du chef ou débattre simplement de la place de l’imparfait du subjonctif dans un système de pensée unique. La philosophie se mettait en marche. Rien ne pourra plus l’arrêter. Sapiens la portera même jusqu’aux plus hauts degrés conceptuels au cours de ses récentes "nuits-debout" ! Et le monde alla ainsi cahin-caha jusqu’à ce que les Akkadiens bâtissent leur empire mésopotamien entre le Tigre et l’Euphrate. Riche, ambitieux et surtout malin, le roi Sargon laissa toute liberté aux startups pour innover. C’est ainsi qu’un potier spécialisé dans la fabrication des amphores pour cidre bouché inventa la roue qui devait grandement faciliter sa tâche ainsi que celle des livreurs de briques qui participaient à la construction de la ziggourat locale. (Chronique du 7 février 2017) Un scribe astucieux et pressé par la concurrence mit au point le sms sur tablette d’argile, raccourcissant ainsi les délais d’exécution des ordres d’achat et de vente des boursicoteurs. (Chronique du 3 novembre 2017) Et un garçon de ferme amoureux de la fille cadette de son maître en oublia de surveiller ses moutons qui allèrent brouter sur des prés salés voisins, complétant ainsi la future gastronomie normande après l’escalope à la crème et la teurgoule. Plusieurs siècles furent évidemment indispensables à la civilisation pour assimiler autant de nouveautés. On découvrit certes le paratonnerre, la machine à vapeur, l’aéroplane et la pénicilline mais ce fut une petite main de laboratoire qui enflamma à son tour la marche du monde avec le transistor. Les auditeurs de Radio Luxembourg purent désormais écouter leur feuilleton préféré, la famille Duraton, non seulement à la maison mais aussi aux champs, à l’atelier et à l’usine. Les paysans peuvent encore aujourd’hui écouter France Culture sur leurs tracteurs 2.0. C’est toutefois au journaliste Aymeric Caron que l’on doit l’un des derniers grands pas de l’Humanité lorsqu’il vulgarisa à la télévision la fabrication de meringues avec le jus de cuisson des pois chiches. Internet et la robotique transforment certes chaque jour nos rapports au monde et au travail. Les algorithmes et l’Intelligence Artificielle pèseront probablement beaucoup sur l’avenir de nos sociétés post-modernes aux flux perpétuels. Mais le retour au pois chiche, qui contribua avec les lentilles et l’épeautre à la révolution agricole du néolithique, nous autorise aujourd’hui la nostalgique impression de retrouver les saines sensations bios que connaissaient nos ancêtres lorsqu’ils gambadaient joyeusement dans les vallées périgourdines de Cro-Magnon. Ce qui laisse bien des espérances aux gourmets qui attendent avec impatience la trêve des confiseurs.

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Commentaires
L
Justement je vais en février semer des pois chiches en hommage à ma grand-mère Elvire qui les semait entre les oliviers...<br /> <br /> La famille Duraton on l'écoutait sur radio Monte Carlo qui avait les mêmes programmes que radio Luxembourg ces deux paradis fiscaux...
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