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Chroniques d'un vieux bougon
7 avril 2020

Et pendant ce temps-là...

rechauffement

Les glaciers fondent, la banquise se désagrège, le niveau des océans s’élève, le permafrost dégèle. D’immenses forêts de bouleaux envahissent la toundra, de verdoyantes prairies habillent les nouvelles plaines du septentrion, genêts, chênes et fayards s’agrippent de plus en plus haut au versant des montagnes. Les déserts s’étendent, peuplés de vents de sable, de nuages de sauterelles et bordés de savanes arborées ravagées par les incendies. Les tempêtes de plus en plus violentes dévastent les contrées les plus paisibles. Les canicules de plus en plus fréquentes asphyxient les cours d’eaux. L’air est saturé de gaz à effet de serre. En un mot, le réchauffement climatique chahute la répartition de la vie sur la planète Terre. C’était il y a 12000 ans.

Sapiens en profitera pour conquérir les territoires jusqu’ici couverts de glace. Il quittera les abris et les huttes où il s’était embourgeoisé pendant 20 000 ans et construira des maisons de pierre dans les vallées hospitalières. Il avait déjà agrémenté de graffitis inspirés les parois des grottes où il se réfugiait parfois. Il destinera désormais toute son énergie à exploiter des champs d’épeautre, d’orge et de millet et à développer l’engraissement de chèvres, de moutons et bientôt de bovins. En un mot, il inventera l’agriculture et l’élevage.

Familles et clans s’étaient déjà regroupés pour se protéger contre les insatiables bêtes sauvages et les terribles pillards toujours avides de femmes et d’esclaves. Ils s’établissent dès lors en véritables villes. Sapiens devient en effet de plus en plus nombreux et doit, à chaque génération, repousser les murs et agrandir ses exploitations agricoles. Après s’être approprié les côtes et les rives des fleuves riches en poissons et en crustacés, il s’insinue toujours plus loin dans les terres, investit des altitudes toujours plus élevées et s’enhardit sur les mers les plus inhospitalières. En un mot, il recouvre la planète toute entière de ses activités.

Ses cousins Neandertal, Denisova et Flores l’avaient précédé partout où c’était possible. Lui seul survivra. La chance ? Le hasard ? La destinée ? Il s’interroge lorsque l’effleurent, devant le spectacle fantastique du ciel, les questions existentielles. D’où je viens ? Qui suis-je ? Où vais-je ? Il a besoin de trouver sa place dans ce maelstrom qui tourbillonne autour de lui. Il la situe bien sûr au-dessus des animaux qu’il domestique et au milieu de dieux omnipotents qui lui ressemblent et qu’il loge dans les nuées infinies. Il leur construit des temples, leur consacre des offrandes et des sacrifices et leur compose de longues épopées. En un mot, il invente la philosophie, la religion et la poésie.

Ses ancêtres hominidés savaient depuis longtemps utiliser des outils de fortune pour attraper leur nourriture ou se défendre de bandes rivales. Il déploiera des trésors d’ingéniosité pour maîtriser le feu, la pierre et le métal. Dès lors, il démultipliera ses modestes forces au centuple avec des machines toujours plus démesurées et toujours plus performantes. Et pour les faire fonctionner, il creuse, il rabote, il brûle, il bétonne. Il construit des palais, des autoroutes, des hôpitaux, des aéroports, des gratte-ciels, des hypermarchés toujours plus hauts et toujours plus vastes. Et voilà que le gaz à effet de serre sature l’air de nouveau. Le climat se réchauffe. Les scientifiques mesurent, calculent et s’alarment. Ils ont tort. L’Homme saura bien un jour, ne serait-ce que pour assurer sa propre survie, remédier à ses inconséquences !  N’est-il pas en effet, et par nature, écologique puisqu’il est "naturellement" biodégradable* ?

Pour l’heure et en dépit des recommandations écologiques à la mode qui prêchent la biodiversité et le respect de toute vie, l’Humanité concentre toutes ses forces à combattre la nature si brillamment représentée en ce moment par un modeste virus (130nm) qui déploie certes et avec un foisonnement grandiose les mille ressources que lui a données la nature mais qui sème hélas le désordre, la confusion et la mort humaine un peu partout sur la planète. 

Mais les ayatollahs de la décroissance exultent devant la chute des courbes de la consommation. Les pourfendeurs des émissions de CO2 dans l’atmosphère se réjouissent, les yeux tournés vers le ciel, avec les tourmentés de la pollution. Les angoissés de la surpopulation comptabilisent avec ravissement les trop nombreuses victimes de la pandémie. Les guérilléros de l’autosuffisance alimentaire par la permaculture ricanent dans leur barbe broussailleuse. En un mot les collapsologues jubilent : l’avenir du futur serait-il enfin arrivé ? (*Jean-Louis Fournier, Tout enfant abandonné sera détruit, Théâtre du Rond-Point Paris 2011) 

 

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Commentaires
L
Malheureusement je crois que Loulou a raison, tant qu'il restera des ressources à piller...
Répondre
L
Ne t'inquiète pas, tout repartira comme avant.
Répondre
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