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Chroniques d'un vieux bougon
30 mai 2011

Eloge de la lenteur

         Une rage subite de rangement, due sans doute au refus de mon esprit d'aligner trois mots cohérents sur une page blanche, a provoqué ce matin une rencontre inattendue avec le livre de Pierre Sansot,"Du Bon Usage de la Lenteur" (Éditions Rivages). Abandonnant la pile d'ouvrages divers que je projetais de déplacer sinon d'exiler dans la grande armoire en chêne héritée jadis de ma grand-mère maternelle et transformée depuis en bibliothèque, je me suis enfoncé dans mon fauteuil et replongé dans les conseils de bon sens prodigués par l'auteur.

           Lors de la sortie de son livre, le hasard m'avait permis de le côtoyer au salon du livre de Brive la Gaillarde. Il y connut un joli succès, fort moindre cependant que la vedette de la télévision qui signait, elle aussi, à quelques encablures de nous. Nous pûmes ainsi disposer de temps pour converser. De tout et de rien, bien sûr ! Mais il en parlait bien. Avec humour et anecdote plaisante au détours de chaque phrase ou presque. Me reste à ce jour le souvenir d'un vieux philosophe du quotidien adepte des menus plaisirs à l'image d'un Philippe Delerm.

           Ce retour inopiné de l'éloge de la lenteur alors que nos journaux bruissent des mesures gouvernementales pour faire respecter les limitations de vitesse sur nos belles routes de France ne peut être seulement le fruit du hasard. Une main, quelque part, a probablement guidé la mienne pour me rappeler qu'il ne faut jamais se précipiter. C'était d'ailleurs ce que préconisait mon grand-père paternel qui a attendu ses 99 ans pouir émettre, lentement, son dernier souffle. Il avançait toujours à petits pas, autant qu'il m'en souvienne de lui, particulièrement lorsque je lui avais caché sa canne. Canne dont j'ai par ailleurs hérité à travers mon père qui l'utilisa peu quant à lui.

            L'un et l'autre, paysans jusqu'au fond de l'âme, savaient magnifiquement user du temps pour leur réflexion comme pour leurs agréments. Point n'est besoin de se hâter, on arrive toujours assez tôt ! D'ailleurs, se déplaçant essentiellement à pied, en chartil ou à bicyclette, ils prenaient bien peu de risque à cet égard. Arrive-t-on aujourd'hui plus à l'heure en tentant de se presser ? Je n'en suis pas persuadé. Attendre le dernier moment pour se lever alors qu'il est si agréable de traîner dans un demi-sommeil tout en rêvant à la journée qui s'annonce ! Avaler un petit déjeuner pour anorexique en courant alors qu'une tartine pain-beurre-confiture plongée dans une grande tasse de café trop chaud est si délicieuse ! Sauter dans des chaussures, la voiture et les embouteillages alors qu'admirer depuis la terrasse les lapins gambader avec insouciance sur le pelouse est si attendrissant !

              Entre deux conseils, Pierre Sansot ne manque jamais de rappeler les joies de la vie rurale et il a bien raison. D'ailleurs, confirme-t-il, son plus grand plaisir est de prendre le temps de glisser ses pieds dans ses sabots de bois et de faire quelques pas dans son courtil avant toute chose. Je crois que je vais l'imiter avant de poursuivre mon rangement. Pierre Dac ne disait-il pas qu'il ne faut jamais remettre au lendemain ce qui peut être fait le jour même...par quelqu'un d'autre. Alors, je décide qu'aujourd'hui, je vais me contenter de regarder l'herbe pousser et d'attendre ! (Roland Bosquet)

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