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Chroniques d'un vieux bougon
2 mars 2018

Le grand remplacement, le temps des robots.

robot

    Le technicien jette un dernier regard sur le tableau de commandes de la machine puis vers mon voisin Sébastien. On y va ? Sans attendre la réponse, il enfonce le bouton rouge. La machine tremble un peu avant de ronronner comme un matou repu et de s’ébranler lentement dans un bruissement feutré. L’homme sourit de satisfaction tel un dieu de l’Olympe qui viendrait de sortir d’un sommeil millénaire quelque créature mythique. Sébastien avance un pas prudent, comme s’il craignait que l’engin n’aille se confronter au muret de ciment qui sépare le couloir central des cases où s’ébattent ses vaches. Mais rien d’aussi dramatique ne se produit. L’engin s’aligne au contraire en parallèle, s’arrête et déverse une première ration d’un mélange de foin broyé et de paille. Un nuage de poussière s’élève, aussitôt emporté par le filet d’air qui aère la bâtisse. Et la machine de poursuivre sa marche avec une lenteur compassée. Il ne lui faudra toutefois que vingt-cinq minutes pour opérer l’aller et le retour d’une porte à l’autre et accomplir ainsi la besogne que Sébastien effectue en deux heures avec sa fourche. Les bêtes, quant à elles, ne moquent bien de savoir qui dépose la pitance devant elles, elles mangent sans autre procès.

L’homme reparti avec son fourgon vers d’autres installations, nous profitons d’une éclaircie du ciel pour pousser le troupeau jusqu’à son enclos. Il ne rentrera que pour la traite du soir. Au regard du grand froid annoncé, il gardera l’étable pour la nuit et ressortira demain, s’il fait beau de nouveau. Nous partageons ensuite le repas préparé par Hélène, l’épouse de Sébastien. J’étais obligé, explique ce dernier. Je ne suis plus tout jeune et deux heures par jour de corvée en moins, ça compte ! En réalité, il a mauvaise conscience de confier son travail à une machine. Je le rassure en lui rappelant qu’il ne risque pas une révolte de son personnel, il n’en pas. Ce n’est pas faute, comme d’autres agriculteurs comme lui, d’en espérer mais selon les rares candidats eux-mêmes, le travail est trop pénible et trop exigeant. Le recours aux robots est devenu indispensable.

Notre époque se présente en effet comme celle du grand remplacement des hommes par les robots. Ils sont partout. Dans les cuisines, dans les laveries, dans les usines, dans les étables, dans les champs. Ce n’est pas nouveau et les descendants des canuts lyonnais s’en souviennent. Mais la tendance s’accélère. Vous-même, argumente Hélène avec un petit sourire, vous n’écrivez plus vos chroniques à la main. Vous les écrivez avec l’ordinateur ! J’ai du mal à m’imaginer penché sur mon écritoire et, armé de ma plume d’oie, calligraphiant mes mots à la lueur d’une chandelle de suif. Le plus difficile, continue Sébastien, sera pour les milliers de gens qui vont perdre leur emploi devenu obsolète. Que vont-ils faire ? Tout le monde ne peut pas être dans les bureaux. Pourront-ils tous apprendre les métiers de concepteur, d’informaticien, de chaudronnier, de soudeur, d’électricien, d’installateur, de mécanicien ?

La tâche sera rude et longue en effet et il faudra veiller à ne laisser personne sur le bord du chemin. Souvenons-nous toutefois qu’avant l’invention de la roue, l’homme devait tout transporter à dos d’esclaves. Ce qui n’était pas rien surtout pour les esclaves. Depuis cette époque révolue, la machine a peu à peu remplacé l’homme, d’abord dans les tâches les plus pénibles puis dans celles où elle se révèle plus rapide, plus précise, plus économe, plus efficace, en un mot plus "rentable". Mais face à ces bouleversements, demeure tout de même une consolation pour les déclinologues et pessimistes à tout crin : aucune machine ne remplacera jamais un retraité heureux.  

(Suivre régulièrement les chroniques du vieux bougon en s’abonnant à newsletter)

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Commentaires
M
Philippe Bouvard a écrit à propos des retraités un article en 2013 qui est même encore plus d'actualité:<br /> <br /> Séniors et saignés !<br /> <br /> <br /> <br /> L'enquête a été longue et difficile. Mais on a enfin réussi à identifier les odieux profiteurs suspectés de maintenir à peu près leur niveau de vie en période de crise, on les appelle des: retraités.<br /> <br /> <br /> <br /> En fait, ce sont des paresseux qui, après 42 années d'activité, donnent un mauvais exemple aux jeunes sans emploi en jouant aux boules ou en réchauffant leurs rhumatismes au soleil.<br /> <br /> <br /> <br /> Il était donc grand temps d'imposer davantage leurs pensions.<br /> <br /> <br /> <br /> Ce rabotage de niche fiscale est d'autant plus urgent que, grâce au progrès de la médecine et de la chirurgie, ces séniors prétendent vivre de plus en plus longtemps sans se préoccuper de la santé de leurs caisses de retraites. Et puis, au moins est-on certain que, contrairement à d'autres contribuables plus valides et plus fortunés, ils ne battront pas en retraite pour fuir un pays où les technocrates de Bercy seront un jour les derniers actifs!...<br /> <br /> <br /> <br /> C'est vrai que la rumeur enfle de toute part : ces salauds de retraités qui ont travaillé pendant les trente glorieuses, voilà de nouveaux bons boucs émissaires (avec « les riches ») pour cracher au bassinet.<br /> <br /> <br /> <br /> Voilà une belle réforme pour la « France juste » que les guignols au pouvoir nous concoctent !...<br /> <br /> <br /> <br /> Philippe Bouvard
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M
On peut s'attendre à un chômage de masse sans aucun "ruissellement" compensateur. Je suis très pessimiste. Quant aux retraités, on va peut-être cesser de nourrir ces bouches inutiles?
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L
Il est en train d'advenir une nouvelle forme de travail : le social-business. Ces entreprises ne feront pas ou peu de profit car tout sera tourné vers l'être humain. Il y a quelques jours, aux USA, une forte majorité de jeunes de moins de 25 ans ont rejeté en bloc le capitalisme sauvage appelé "capitalisme américain". Les choses changeraient-elles ? Mais pour l'instant, il nous reste à nous protéger de cette robotisation forcée dans notre courtil (pour ceux qui en ont la chance d'en posséder un !)...
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J
Bonjour.<br /> <br /> L'informatique comme la robotique ont changé tout cela.<br /> <br /> Là, ou avant, il y avait 5 à 10 personnes pour différentes tâches, aujourd'hui, avec toutes ces machines à commandes numériques, il suffit d'une seule personne qualifiée, et hop, le tour est joué. J'ai également, après avoir travaillé durant 12 ans et six mois en informatique, travaillé ( durant dix ans..) sur machine outil à commande numérique ( du fait du cancer de mon épouse et qui m'avait fait arrêter mon travail d'avant pour pouvoir être plus près d'elle et auprès d'elle..) et dans une entreprise locale (donc sur place..) qui travaillait en sous-traitance, entre autre, pour "Cuisines Schmidt".."Cuisinella" et tant d'autres, mais également pour la confection de planchers pour wagons et rames de "T.G.V.", et également Motrices de "T.G.V.".<br /> <br /> Depuis, les débuts et la mise en place progressive de l'informatique pour assister toutes ces machines en usinage et autre, le monde du travail a, certes, évolué ( sur le plan technique et avancée..technologique moderne..), mais cela a divisé le travail par 5, voir par..10.<br /> <br /> Le coût du travail étant, en permanence, une forme de revendication, tant du patronat que du "MEDEF", il ne faut pas s'étonner, non plus, de toutes ces délocalisations injustes, et souvent, pour quel résultat ( en qualité comme suivi et résultat final..). Mais, il faut savoir que la machine seule ne fait pas tout, loin de là, ni sans..l'humain.<br /> <br /> C'est comme pour la récupération d'informations spatiales, dont dans le domaine militaire, après, il faut toujours des hommes au sol pour confirmer, comme pour "SPOT", pour la gestion des terres agricoles en Europe.<br /> <br /> Bonne fin de journée à vous et très bon weekend..Denis.
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M
Tout cela m'effraie. Il y a beaucoup de chômeurs. Des vieilles usines sont abandonnées pour en construire de plus belles, plus grandes, plus rentables, mais avec moins de main d'oeuvre. Je voyais hier à la télé un reportage sur la croissance. L'industrie automobile se porte bien et on construit des milliers de voitures. Je me demande si ce sont les machines qui vont les acheter !<br /> <br /> Les agriculteurs ont du mal à s'en sortir. Ils sont en concurrence avec les américains qui ont des milliers d'hectares, des milliers de vaches et d'énormes machines. Encore un vaste sujet.
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